Le Tarn-et-Garonne, de villes en villes

Après les campagnes et leur désert d’hommes, j’aborde les villages plus civi­lisés du Tarn-et-Garonne. Quelques humains vont venir peupler mes photos. 

Avec ses soixante-six habi­tants au kilo­mètre carré, le Tarn-et-Garonne est le dépar­te­ment le plus peuplé de cette diago­nale du vide, haut la main. D’Au­villar à Montauban, je quitte avec plaisir les campagnes et leur désert d’hommes. Quelques humains vont venir peupler mes photos. Ça me manquait !

Depuis le début de ce voyage en France, ma notion de ville a un peu changé. Désor­mais, n’importe quel village pourvu d’une boulan­gerie, d’une épicerie et d’un quel­conque bar-restau­rant est un îlot de civi­li­sa­tion qui rompt la soli­tude du voyage contem­platif et l’austérité du voyage itinérant.

Depuis la terrasse d'Auvillar, surplombant la Garonne

Streetphoto dans les villes de Tarn-et-Garonne

À Auvillar, vieilles pierres et lumière esti­vale. L’endroit compte parmi les plus beaux villages de France et les premiers touristes sont au rendez-vous. Le Tarn-et-Garonne commence bien.

Le cloître de Moissac, chef d’oeuvre du XIIème siècle, est un décor idéal. On s’extasie devant les têtes de chapi­teaux sculptés, on se ressource à l’ombre du cèdre sous le regard nostal­gique du prophète Jérémie.

Le long du canal du midi, c’est déjà les vacances. Pique nique, chapeaux de pailles et balades à vélo. Je ne suis pas seul sur la route ! (L’iti­né­raire de Toulouse à Montauban à décou­vrir chez les collègues cyclistes d’Un monde à vélo)

La halle au grain d'Auvillar - Carnet de voyage Tarn-et-Garonne
Différents types de méditation au cloître de Moissac - carnet de voyage en Tarn-et-Garonne

Le long du canal du midi

Des silos, des usines et le bruit des voitures. Passé Castel­sar­rasin, l’atmosphère est un entre deux : plus vrai­ment la ville, pas vrai­ment la campagne.

Alors que la pleine lune se lève, je cherche en vain l’endroit tran­quille où planter ma tente. Je finis par m’installer le long du canal à l’abri du feuillage. La pluie est prévue pour demain.

Le Tarn et Garonne est le verger du sud-ouest, j’ai fait quelques provi­sions au marché. Je dîne au bord de l’eau d’une pomme et d’un reste de radis.

Le long du canal du midi - carnet de voyage en Tarn-et-Garonne

Championnat de pêche

Des para­pluies sont alignés le long du canal. C’est l’épreuve régio­nale du cham­pionnat de France de pêche, troi­sième divi­sion. Le regard de Claude se perd dans l’eau :

« Des bébés pois­sons chats et des brèmes. Je ne fais que ça depuis ce matin. Une fois qu’on tombe sur un banc, tout le reste, c’est du poisson chat. »

Le bouchon dispa­raît. Une prise minus­cule gigote au bout de la canne immense. Il la ramène machi­na­le­ment sur le bord, soupire, relance une amorce, replonge son bouchon dans l’eau. La pluie tombe toute droite, le vent souffle en bour­rasques hori­zon­tales. Sal temps pour les pêcheurs !

« la pêche, c’est plus physique que le rugby, je vous le dis ! Ça dure neuf heures ! Ce matin, avec l’orage, un concur­rent a retrouvé toute son instal­la­tion de l’autre côté du canal. »

J’en sais quelque chose… Le vent a aussi eu raison de ma tente. L’arceau, fissuré de toute part, est défi­ni­ti­ve­ment hors d’usage. Privé d’abris, j’avance sous l’eau jusqu’au prochain village : Montech.

L’organiste de Montech

Elisa­beth m’a reconnu dans le journal.

« Mathieu ! Après avoir fait la une des jour­naux, ce soir je vous offre le couscous ! »

Mon voyage enthou­siasme cette femme née en Algérie qui aime­rait tant voyager. Mais son mari Philippe n’est pas du bois dont on fait les navires. Sa nef à lui est celle de l’église du village. Orga­niste et carillon­neur, Philippe tient le pupitre tous les dimanches à la messe.

Il me propose la visite comme on propo­se­rait un tour de manège. Manettes, tirettes, boutons… Trom­pettes, voix, bour­dons… On teste tous les jeux. Je jette­rais bien un œil sous le capot. Il suffi­sait de demander. Philippe adosse l’échelle au buffet, fais jouer les morceaux de bois qui tiennent le grand panneau arrière. Nous péné­trons dans la pénombre d’une forêt de tuyaux de bois et de métal. De moi ou de lui, je ne sais pas lequel est le plus heureux.

Eliza­beth n’est pas près de partir en voyage…

Bougies et confettis à Montauban

« Jeune homme… JEUNE HOMME !!! »

La voie, alcoo­lisée, résonne entre les façades. Je sens bien qu’il faut que je me retourne.

« Je vois que vous êtes à la rue… »

Ce n’est pas complè­te­ment vrai. J’ai trouvé un couch­sur­fing pour la nuit et je suis en route vers le loge­ment de mes hôtes, le Carrix à ma suite.

« Voici quelques bougies. Elles vous seront utiles. On a toujours besoin de lumière. »

Je suis touché par le geste mais ce cadeau sent le coup fourré. Je ne voudrais pas vexer mon peut-être géné­reux bien­fai­teur. J’hésite, ouvre le sac au béné­fice du doute. Sur une dizaine de bougies d’offrandes, Sainte Thérèse de bon secours me salue.

J’accepte le présent avec recon­nais­sance et file à la cathé­drale toute proche remettre les lumi­gnons dans le présen­toir où ils ont été « empruntés ». Je ne manque pas d’en allumer un à la santé des buveurs.

Sur la place natio­nale, on célèbre le carnaval. Les ballons flottent, les confettis volent.

Les journalistes

« À quoi on pense quand on marche ? »

Je suis l’invité de l’émission « À qui le tour » sur RCF et son présen­ta­teur Rémy Torroella me pose cette ques­tion à laquelle je ne sais pas trop quoi répondre.

La plupart du temps, j’écoute le chant du grillon, j’ajuste les sangles de mon Carrix et je me perds dans la contem­pla­tion de ce qui m’entoure. Quand je marche, je ressens plus que je pense. La marche est une médi­ta­tion en action.

Le simple fait de mettre un pied devant l’autre, de ressentir mon corps, d’être plei­ne­ment présent… Mon plaisir de la marche se résume à ça. Et puis, aussi, à m’affranchir des routes et de leurs itiné­raires utili­taires pour suivre les sentiers qui mènent on ne sait pas trop où.

Place au voyage

À la veille de mon départ, je me penche sur les cartes pour essayer d’imaginer un semblant d’itinéraire pour les jours à venir. Mes plans – un portrait, une descente en canoë – tombent à l’eau avec les averses des derniers jours. Pied de nez du destin, je passe mon temps à dire que le vrai voyage commence quand on ne sait pas où l’on va.

Place au vrai voyage donc !

Le livre d’un voyage exotique en France

Peut-on faire un voyage exotique dans son propre pays ? Pour y répondre, j’ai traversé la France à pied à travers la diago­nale du vide.

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Commentaires

Bonjour Matthieu
Merci pour ces instants de voyage à pied et leur partage.
Alors, fina­le­ment, le Carrix : bien après réglages et adap­ta­tion ? On se pose la question.
Bien amicalement
Antoine et Fanny ( entre Le Havre et Etretat, au bord du vide, donc !)

Merci Antoine et Fanny 🙂
Oui, bien le Carrix. Le système « allège » vrai­ment le dos et les genoux. Sans, je n’au­rais tout simple­ment pas pu conti­nuer mon voyage.
Sur du chemin roulant ou sur la route, rien à redire, c’est parfait, une fois compris la manière de le régler.
Sur des pentes caillou­teuses et escar­pées, par contre, ça devient vite pénible. Pour passer de causses en causses en Lozère, par exemple, j’ai fina­le­ment choisi le vélo 😀
Si vous n’avez pas prévu de faire de la montagne, en gros, c’est une super solution !
Bonnes balades (au bord du vide, au milieu ou sur les côtés !)
Mathieu

Superbe récit de voyage, j’aime toujours autant ce côté petits villages de France ! Bon courage pour la suite !

Merci Anne 🙂
Moi aussi j’aime toujours autant. Les villes sont mes oasis entre deux traver­sées du désert (au delà d’une boulan­gerie, d’un resto et d’un bar, je parle de ville) !
Merci pour le courage, tout est trop beau pour que j’en manque 😉
À bientôt !

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