Sur la grande traversée du massif central

Fini la randonnée à pied, me voilà cycliste ! C’est sur un vélo que j’accrocherai mes bagages, désor­mais. Ravi de retrouver des sensa­tions que je connais bien, j’attaque bille en tête la grande traversée du massif central.

Fini la randonnée à pied, me voilà cycliste ! C’est sur un vélo que j’accrocherai mes bagages, désor­mais. Ravi de retrouver des sensa­tions que je connais bien, j’attaque bille en tête la grande traversée du massif central.

Ruynes en Marge­ride !!! On ne pouvait pas trouver meilleur nom pour résumer ces trois jours passés sur la Grande Traversée du Massif Central. En seule­ment trois jours, mon vélo est détruit. Garde boue cabossé, système élec­trique arraché, selle bran­lante, sacoche avant déchirée. Le ton est donné : Il va y avoir du sport…

Je suis prêt à en découdre pour une bonne raison : le vélo solli­cite d’autres muscles que la marche à pied. Confor­mé­ment à mes attentes, ces trois derniers jours, mon dos a été un peu en vacances – Ok, disons… en week-end !

La grande traversée du massif central - Sur le causse de Sauveterre

La Grande Traversée du Massif Central à vélo

La grande traversée du Massif Central (ou GTMC) se range dans la caté­gorie aven­ture, option cyclo­tou­risme. Des volcans d’Auvergne aux plages de médi­ter­ranée, l’itinéraire esca­lade les sommets, enjambe les vallées sur plus de six cents kilomètres.

J’ai roulé dans les Andes, gravi les sommets iraniens, emprunté les routes du Népal et de Guinée Conakry lors de mon tour du monde à vélo. Ce petit bout de montagne est une mignardise !

De Mende jusqu’à Alteyrac, sur le Causse de Sauve­terre, les premiers kilo­mètres font ressurgir mes expé­riences passées. Combat contre la pente, ivresse de la descente, sensa­tion de vitesse, sour­noi­serie du vent… Seul élément nouveau : la chasse aux balises.

La grande traversée du massif central - Chevaux sauvages en Margeride

À la recherche des sentiers balisés

Sur le coup, la remarque du respon­sable de l’office du tourisme de Mende m’avait semblé anodine :

« Ah vous remontez ? Vous faites le trajet à l’envers alors, parce qu’il n’est plus balisé que dans l’autre sens. Quand on part en vacances, on descend, on ne remonte pas ! »

La grande traversee du massif central - Les forêts de Margeride

Petit un, je ne suis pas en vacances et petit deux, si un chemin est indiqué dans un sens, il l’est forcé­ment dans l’autre. Ma logique trouve vite ses limites sur le terrain. La navi­ga­tion le long de cette GTMC me donne du fil à retordre.

Le nez sur ma carte, je vérifie l’itinéraire à chaque virage. Je le suppose opti­misé pour les vélos, limi­tant les déni­velés, choi­sis­sant les moindres reliefs. Mes vingt kilos de bagages et les pentes à deux chiffres m’intiment la vigi­lance. L’erreur me coûte­rait cher.

Les forêts de Margeride

Sur les flancs de la Marge­ride, je suis les chemins d’entre deux, entre prai­ries rocailleuses et sapi­nières. Dans l’ombre des forêts, des cadavres de troncs débités pour­rissent sous les branches. Cette terre d’estive ne rit plus des cloches des brebis. Rien que le vent de la liberté soupi­rant dans les branches.

Le premier village, Saint Paul Le froid, dispa­raît loin dans la plaine. À mille quatre cent mètres d’altitude, le froid est piquant, l’air limpide, le ciel lacté.

La mémoire du Gévaudan

J’atteins les confins du Languedoc et de l’Auvergne. Les blocs de granit massifs ont laissé place à des pierres qui s’éboulent et rendent les chemins pentus de la GTMC impra­ti­cables. Je me suis trompé de véhi­cule. Sur la place de Paulhac en Marge­ride, c’est un ballet sonore de 4×4, de quads et de tracteurs.

L’église est ouverte. J’y fais une pause pour recharger mes batte­ries et celles de mes appa­reils. Trois cierges sont allumés. La foi en Dieu est donc encore vivace ici ? C’est que je ne suis pas n’importe où.

Le 10 juin 1767, un grand pèle­ri­nage a lieu à Notre Dame de Beau­lieu. Toute la région vit dans la peur d’une bête qui fait des dizaines de victimes et terro­rise la région. Une battue est orga­nisée et trois balles coulées avec des médailles saintes sont bénies.

La grande traversée du massif central - Paysages d'altitude entre Haute-Loire et Cantal

Sous le porche de l’église, on peut lire le récit du moment fatidique :

« Notre Dame, déli­vrez le pays de la bête du Gévaudan. »

Jean Chastel l’attend, il lit dans son livre d’heures les lita­nies à la vierge. La bête va vers lui. Il la voit venir et la recon­naît bien. Il termine sa lecture, plie ses lunettes calme­ment, prend son fusil, épaule et tire.

« Bête, tu n’en mangeras plus ».

Taran­tino apprécierait…

L’ascension du Mont Mouchet

Sur le Mont Mouchet, les champs sont défendus par des barbelés, les forêts labou­rées de traces de trac­teurs et jonchées de débris de sapins. Impos­sible de planter la tente.

Le soleil se couche alors que je cherche toujours où bivoua­quer. À la lumière de la fron­tale, les doigts crispés sur les freins, je dévale tant bien que mal ces sentiers raides creusés de tran­chées qui sont autant d’obstacles. Les racines créent des marches cassantes. Mon vélo bondit, mes sacoches rebon­dissent, mes jantes crissent, je sers les dents et passe comme une balle, à deux doigts de la chute.

Le retour au silence de l’asphalte est une libé­ra­tion. Mes roule­ments à billes résonnent dans la lumière orange des pylônes élec­triques. Je pousse jusqu’au premier village – Ruynes en Marge­ride donc -. Il est onze heure du soir. La ville dort, je ne serai pas dérangé. Je campe sur la place du village, derrière le kiosque à musique. Prêt pour l’ouverture de la boulangerie !

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Le livre d’un voyage exotique en France

Peut-on faire un voyage exotique dans son propre pays ? Pour y répondre, j’ai traversé la France à pied à travers la diago­nale du vide.

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Commentaires

Merci Laurent 🙂
Oui c’était une belle rando, assez engagée, surtout pour le vélo !
J’ai clai­re­ment compris la diffé­rence qui sépa­rait un vélo tout chemin (le mien) d’un vélo tout terrain !

Merci Germain 🙂 Alors là, je n’ai pas mon vélo sous la main mais c’est un vieux Gazelle retapé et acheté d’oc­case dans une boutique pari­sienne. Modèle Bahia ou cayo, je ne sais plus, clai­re­ment plus taillé pour la route que pour les sentiers engagés. Ce qui est sûr, c’est qu’il faut un VTT pour affronter les descentes caho­teuses et truf­fées de racines qui te dézinguent tout du garde boue aux sacoches en moins de deux.

Ça a l’air vrai­ment chouette comme itiné­raire, ça me tente­rait bien car je cherche des itiné­raires vélo un peu vallonné. Un VTT est-il vrai­ment indis­pen­sable ou est-ce que ca peut passer en gravel ? Est-ce que le sentier est tech­nique (sur les photos ça a l’air d’aller mais c’est peut etre pas représentatif ^^)

Hello Mathilde ! Si tu cherches des itiné­raires « un peu vallonnés », tu vas être servie, voir un peu submergée. Je ne prends en général pas de photos quand je suis concentré sur la route, mais plusieurs fois, j’ai eu droit à des chemins en esca­lier à cause des racines et à de la pente sérieuse sur des sentiers de forêt creusés de tran­chés ici ou là. C’était vrai­ment sport et j’étais limite avec mon VTC qui a pas mal souf­fert. Du coup je recom­man­de­rais si tu as la possi­bi­lité de prendre plutôt un vélo avec des pneus larges et assez costaud. Ensuite, moi je l’ai fait à VTC et le vélo est toujours là, mais j’ai de la pratique et un peu de tech­nique pour fran­chir les obstacles… Mes sacoches ont volé une paire de fois, ça te donne une idée de l’en­ga­ge­ment requis 😉

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