Quatre saisons en France. J’avais décidé que ce voyage durerait un an et que je passerais l’hiver là où il y aurait de la neige. Les neufs premiers mois de voyage à pied se sont avérés relativement plat. Les neufs mois suivants vont se révéler autrement physiques. Quand le voyage prend du relief…
Un coup de baguette magique, et me voilà dans les Pyrénées. Déjà ?!? Eh oui déjà. Je voulais voir les montagnes sous la neige. Et puis il y avait cet itinéraire, cette fameuse « grande traversée des Pyrénées » au nom plein de promesses.
J’ai envie d’en découdre avec la montagne. Ce sera le défi physique du voyage. Ce que je ne sais pas, c’est qu’il va durer plus longtemps que prévu.
La grande traversée des Pyrénées
Le sentier du littoral court le long de la corniche sous un vent violent. Côté terre, des nuages s’accrochent au sommet de la Rhune, le premier mille mètres de la chaîne des Pyrénées. La randonnée commence au pays basque.
L’hiver est doux cette année. Doux et humide. Pluie, nuit, vent, malgré l’absence de neige, les caprices de la météo me rendent vulnérable. Impossible de planter la tente. D’étape en étape, je me plie aux contraintes de la marche en montagne.
J’espère atteindre la neige des premiers sommets. C’est pour ça que je suis venu. Malgré les mises en garde et les avertissements, je me lance en direction des sommets d’Iraty. Le long du GR10, la grande traversée des Pyrénées continue.
Les Pyrénées sans carburant
De pics en pics, je trimballe les vingt kilos de mon sac à dos pour une dernière étape rocailleuse et grandiose. Il était temps d’arriver ! Les dernières semaines ont été dures physiquement.
Installé bien au chaud, je savoure mon séjour dans un refuge de la vallée d’Aspe. Mon corps réclame une pause dans son langage de corps : douloureux. Je coupe le moteur. Pause technique obligatoire.
Sédentaire par la force des choses, j’explore les Pyrénées de l’intérieur, chez les barons des Pyrénées, retranchés dans leurs vallées d’altitude. À Bagnères de Bigorre, je quitte les estives et je laisse mon dos souffler un peu chez Sam. Berger, fromager et petit paysan, c’est un nomade 100% non digital.
Dans le Gers, pélerinage gastronomique et voyage initiatique
Fiesta, bonnes chères et copains ! Après les rigueurs de la montagne et de l’hiver, le Gers s’annonce comme un pays de cocagne. Mateo m’introduit auprès de ses « frade » de Gascogne : chefs cuistots, producteurs d’armagnac, accordeurs de tondeuses…
Après plusieurs semaines de repos relatif, je reprends la randonnée. De Montesquiou à Roquefort, l’itinéraire transperce le coeur de Gascogne. À travers champs et villages perchés, les paysages défilent sous la roue de mon nouveau compagnon de voyage.
Dans le nord du Gers, du jour au lendemain, les chemins se peuplent de hordes de marcheurs déferlant vers le sud. Je suis sur les autoroutes de Compostelle. À contre-courant, je redeviens pèlerin et rencontre ceux qui transmettent « L’esprit du chemin ».
Dans le Tarn-et-Garonne, des déserts et des villes
Je retrouve avec plaisir l’agitation des villes dans le Tarn-et-Garonne. Fête, musique et confettis ! Quelques humains vont venir peupler mes photos.
Les contreforts de l’Aveyron sont en vue ! Suivi de mon sac à roulettes, je me lance à l’assaut des sentiers caillouteux, escaladant les causses de forteresses en forteresses, entre deux orages.
Je suis rejoint par un covoyageur un peu spécial : mon père. En chier ensemble, rien de tel pour resserrer les liens ! C’est un peu notre séminaire de team building familial…
Dans l’Aveyron, backpacking et couchsurfing
Une pause s’avère nécessaire. À Arvieu, je surfe sur le canapé de Vincent. Arvieu, c’est la campagne haut-débit ! Ce petit village d’Aveyron a pris son destin en main. J’ai une semaine pour comprendre ce qui s’y passe.
Voilà déjà plus d’un an que je voyage à pied et que la fatigue s’accumule. Du Levezou au Larzac, les reliefs de l’Aveyron sont superbes mais la chaleur de l’été me donnent du fil à retordre.
Dans le désert des grands causses, j’avance dans la douleur. À l’approche des Cévennes, ma décision est prise : c’est la fin du voyage… à pied.
En Lozère, je deviens cycliste
Je m’élance pour une dernière étape entre terre et ciel sous le regard des vautours. Un baroud d’honneur à pied sur le causse Méjean pour me vider la tête…
Mende marque un grand changement. Plus de sac sur le dos, plus de poids à porter. Désormais, c’est sur un vélo que j’accrocherai mes sacoches. J’étais marcheur, je deviens cycliste !
Des ailes me poussent dans le dos. J’attaque bille en tête la grande traversée du massif central. Mon vélo a du mal à s’en remettre…
Dans le Cantal, steppes et volcans
Le temps de rerégler, réparer, récupérer chez Françoise et Jean Claude, la chevauchée reprend, magnifique, des steppes lumineuses du Cézallier au hameau de Brion. Un bistro très spécial m’attend là-bas.
Au sud, les Monts du Cantal dominent le plateau. C’est l’occasion d’une petite incursion au pays des volcans. De Puy en Puy, les mollets travaillent mais le plaisir du voyage est de retour !
En Corrèze, voyage en utopie
Un peu d’optimisme et d’humanité, ça fait du bien par les temps qui courent. J’en déniche là, pas loin, en Corrèze.
Le lieu s’appelle le battement d’ailes et offre un petit sas de décompression providentiel ! À un jet de pierre de Tulle, des gens vivent, expérimentent et mettent en pratique les idées auxquelles ils croient.
Plus haut, sur le plateau de Millevaches, c’est une pleïade d’associations qui anime la montagne limousine. Leur credo : prendre sa vie en main au lieu de changer le monde.
Pas mal comme résolution !
Dans la Creuse, au coeur du vide
La Creuse est le département le moins peuplé de France, juste après la Lozère.
Au coeur de la diagonale du vide, la balade est nature. Les cuisiniers jardinent, les étudiants font l’école buissonnière, les botanistes peaufinent leur science du paysage…
À Guéret, il n’y pas que les plantes qui poussent. Espaces de coworking, fab-lab et imprimantes 3D. De rencontres en rencontres, je découvre la Creuse qui booste.
Après un petit crochet par l’Indre voisine où d’étonnantes fresques andines flamboient en plein coeur de la France, j’enfourche mon vélo pour une dernière chevauchée qui me mènera au terme de ce voyage.
Dans l’Allier, la France inattendue
C’est le dernier département de mon voyage en France et, j’avoue, je n’ai pas préparé grand chose. Le compte à rebours est lancé, j’ai hâte d’en finir et de me mettre au chaud… C’est comme ça que les surprises arrivent !
De l’Allier, on m’avait vendu le bocage et les châteaux. Je me retrouve avec des pagodes et des mines… À Noyant d’Allier, l’Asie s’invite au cœur de la campagne.
Un peu pressé par le temps, je m’enlise dans le bourbier bourbonnais et son tourisme nostalgique sauce yéyés. Parfois, dans le voyage, on se trompe… Dans l’embouteillage de Lapalisse, je me sens lost in translation.
On me parle d’un couple qui a décidé d’amener l’art urbain au cœur du bourbonnais. Street Art city est effectivement un projet fou. Joli feu d’artifice de couleurs pour cette dernière étape de mon voyage en France !
Commentaires
Comme d’habitude, superbes photos.
Je suis passée tout près du plateau des Milles Vaches il y a deux semaines et j’étais tellement déçue de ne pouvoir m’y arrêter quelques jours pour découvrir tous ces lieux qui proposent une autre vie…
Quelle est la prochaine aventure ?
Merci Claudia 🙂 Oui, ça grouille là-bas ! Ce n’est que partie remise !
En même temps, cette expérience chez les coquilles Saint-Jacques, ça n’avait pas l’air mal non plus 😉
La prochaine aventure ? Je sors le livre et ensuite j’avise. En tout cas, c’est pas les idées qui manquent !
Peut-être pour commencer un déménagement à Rome…
De très belles photos et une jolie plume ! Et quel périple ! J’admire le parcours et le voyage, peu de gens prennent le temps de découvrir ses coins méconnus de France, et c’est bien dommage 🙂
Je ne connais pour l’instant que la Corrèze (que j’ai adorée), mais je compte bien continuer sur ma lancée. Je suis passée souvent en voiture dans les coins dont tu parles, et je retrouve les paysages que tu décris, ça donne envie d’y aller ! Alors merci pour l’inspiration 🙂
Merci Céline 🙂 Oui c’est vrai que peu de gens se penchent sur leur environnement direct. On croit toujours que c’est mieux ailleurs et que chez soi c’est ringard. Il faut avoir un peu voyagé pour se rendre compte de tout ce qu’on a autour de nous. La France est un pays magnifique et je suis vraiment ravi de ce voyage qui n’a rien à envier à tous les autres que j’ai pu faire auparavant aux quatre coins du monde. Effectivement, on passe souvent à 130 km/h, sans s’arrêter dans ces territoires où « il n’y a rien ». Il n’y a pas « rien », il y a une nature magnifique et un super terrain de jeu pour celui qui a le temps et la curiosité de s’y pencher. Merci pour ton petit mot, Miss !
Bonjour, je prévois moi aussi une grande randonnée dès le printemps prochain. Vos photos me rendent encore plus impatient de ce projet. Sauf celle avec les éoliennes. Quelle horreur !
Bisous.