Voyager en Inde à vélo ? Une manière plutôt engagée de découvrir mother India de l’intérieur. Chaleur accablante, petites routes défoncées, accueil « tactile »… Un voyage loin de la ballade de santé.
Mettez-vous dans l’ambiance
Traverser l’Inde à vélo en avril, c’est rouler sur la paille qui jonche les bords de la route, saluer les paysans qui s’activent dans une campagne chauffée à blanc, voir les couleurs disparaître sous une lumière crue. C’est la fin de la saison sèche dans l’Utar Pradesh et la température ne cessera de grimper jusqu’à la mousson.
Tout schuss sur la selle
Miracle de la mémoire olfactive ! L’odeur de la crème solaire qui protège mon nez m’inspire des souvenirs de sports d’hiver. Pour oublier cette chaleur accablante, j’imagine des pistes enneigées. Fantasme givré… Je vendrais père et mère pour un milk-shake vanille !
Sur ma selle, j’adopte le même comportement que sur une paire de skis. Position de recherche de vitesse, slalom entre les trous, les rickshaws, les vaches sacrées, répartition du poids pour éviter la chute ou compenser les chocs, tout y est, jusqu’aux bananes qu’on dévore en guise de barres chocolatées, comme sur le télésiège !
Réapprendre à lire une carte routière
Comme sur un domaine skiable, nous choisissons la difficulté des pistes à leur couleur sur la carte. Piste rouge, c’est de la nationale, du gâteau. Nous atteignons des pointes de 30 km/h. Les mécaniques rutilantes de nos vélos dépassent dans un silence impérial les bécanes qui couinent et qui craquent de nos homologues indiens. Quelques inconscients tentent de suivre notre cadence dans un sursaut d’orgueil et de curiosité. Ils se font vite une raison.
Piste jaune, terrain plus chaud, c’est slaloms entre les nids de poule et les rétrécissements de chaussée. Nous descendons de notre piédestal de chevalier pourfendeur de goudron pour endosser le statut de simple deux-roues.
Emmener le peloton
Sur la route, chaque vélo dépassé se met automatiquement dans notre roue pour pouvoir profiter à loisir de la ligne racée de nos montures. Se forme ainsi un petit peloton pouvant aller jusqu’à six bécanes, que nous emmenons et distançons dès que la route le permet.
Piste blanche, c est la misère, Beyrouth, le fond du trou. Notre trace se fait sinueuse, nous visons entre les bosses, manquons la chute, en équilibre entre deux ornières et continuons tout bêtement sur le bas côté de la voie. Dans ces conditions, pédaler dix kilomètres sans réparer, c’est déjà un succès.
Nous retenons finalement un autre critère de sélection pour choisir notre itinéraire : face aux dangers des camions, des bus, des 4×4 et des tracteurs qui forment le panthéon indien des dieux de la route, nous empruntons les axes les moins fréquentés.
L’équipée (moyennement) sauvage
Bénarès nous a montré le visage d’une Inde plus apaisée et nous avons décidé de traverser la campagne indienne pour éviter la foule.
Ce que nous ignorons, c’est que la province de l’Uttar Pradesh, bien que deux fois plus petite que la France, compte trois fois plus d’habitants. Pour le calme et la tranquilité, il va falloir patienter, parce que non contents d’être nombreux, les Indiens sont d’une curiosité maladive.
Les arrêts au stand sont autant de bains d’une foule compacte fascinée tant par nos barbes que par nos mécaniques rutilantes et qui touche à tout en posant inlassablement les mêmes sempiternelles questions :
« Where do you come from ? »
« Do you like India ? »
« Bicycle how much ? »
« You married ? »…
Des étapes à l’abri de la foule
Quinze minutes de solitude (à deux)… C’est le seul répit que nous octroieront les Indiens, en deux mois de voyage. Les nuits d’hôtel sont nos seuls moments de répit.
Moi qui souhaitais découvrir et partager le quotidien des habitants, ce luxe qui nous isole de la population me fait un peu honte. J’ai l’impression de tricher en ne prenant que ce qui m’arrange pour mieux, une fois servi, me retrancher derrière des murs. Ce n’est pas comme ça que j’imaginais ce voyage mais nous devons faire sans notre tente égarée avec les autres bagages dès le premier jour à New Dehli.
Franck s’accommode mieux de la situation. Il apprécie à sa juste valeur le confort d’une chambre, d’un lit, d’une douche. La fatigue et la chaleur lui donnent raison mais dans ces conditions, comment allons-nous rentrer dans l’épaisseur du pays et faire les rencontres que nous sommes venus chercher ?
Le voyage en Inde se poursuit ici :
- Les premières heures d’un tour du monde à vélo
- Prendre le train en Inde, un défi
- Voyager à vélo en Inde : les règles de survie
- Pélerinage musical à Bénarès
- Bihar : la traversée du far-east
Commentaires
Article sympas !
Merci Nassim 😀
C’était sport l’Inde !!
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