Je passerais des heures à observer les animaux sauvages. Mais depuis le début du voyage, ils jouent à cache-cache. Dans cette partie où je suis le loup, je perds à chaque fois et mon appétit ne cesse de grandir. J’espère le satisfaire aux tanières d’Auberive, en plein coeur du parc national des forêts de Champagne et Bourgogne.
Mettez-vous dans l’ambiance
Enfouies dans la terre au cœur d’une vallée sauvage du parc national des forêts, les tanières d’Auberive permettent d’observer les animaux sans les déranger. Avec une densité de quatre habitants au km2, ce sont eux sont les véritables maîtres des lieux. Une biche. Un renard. Un chevreuil. Je vois des formes lointaines disparaître derrière le talus. J’entends bruisser les feuilles. Ces apparitions fugaces me laissent sur ma faim. Pire, elles aiguisent mon appétit.
Au coeur du parc national de forêts
Jean-Yves Goustiaux connaît toute la magie de ces rencontres avec la vie sauvage. Plus jeune, il a passé un mois dans la forêt pour recenser les chevreuils.
« Ce qui était fascinant, c‘était de sentir resurgir en moi des choses que je croyais éteintes. Au bout d’un mois, tous mes sens étaient bien plus affûtés, ma lecture du terrain beaucoup plus précise. »
Mon instinct ne demande qu’à être réveillé.
Le parc national de forêts
Depuis le 6 novembre 2019, 241 000 hectares de forêt aux confins de la Côte d’Or et de la Haute-marne forment le parc national de forêts de Champagne et Bourgogne. Il protège de vastes forêts feuillues et valorise des paysages préservés de sources et de rivières… Un terrain particulièrement propice aux classes natures, à l’observation des animaux et à la découverte du patrimoine rural.
Adresse : 4, ruelle du monument, 21290 Leuglay
Tél : 03 80 93 10 92
www : forets-champagne-bourgogne.fr
Une nuit dans un perchoir
Cette nuit là, je dors dans un perchoir. Juchée sur des pilotis, la structure de métal et d’osier du « nid d’Amorey » domine la vallée et s’ouvre sur le ciel.
Le vent est tombé avec le lever de la lune. J’entends le souffle lourd de la forêt qui respire. Craquement d’une brindille. Chuchottement des feuilles. Les notes haut perchées des crapauds percent le silence dans un style télégraphique. Quelques hullulements résonnent à distance. Les stridulations des grillons font vibrer l’air comme s’il scintillait.
Je ne vois rien, j’entends tout. Mes oreilles sont mes yeux. Je me sens parfaitement présent.
Parfois, comme une surprise, le rythme syncopé d’un pas léger. Glissement dans les feuilles. Silence. Craquement brusque, terre qui résonne sourde, la cavalcade s’éloigne, et puis de nouveau, retour au plain chant de la forêt.
La lumière de ma lampe fait l’attraction. Que se passe-t-il en l’air ? Que se passe-t-il en bas ? J’ai toute la nuit pour écouter vibrer ce monde.
L’instinct du chasseur de photos
J’emprunte les galeries végétales qui percent la forêt communale la tête encore toute pleine de la nuit précédente. Je n’ai rien vu mais j’ai expérimenté l’invisible.
Une odeur sucrée de foin mouillé sature l’air. Les feuilles détrempées étouffent le bruit de mes pas. Perdu dans mes pensées, je mets quelques secondes avant de me figer net. À cent mètres, deux biches avancent d’un pas prudent. J’ai rêvé de ce moment. Mon appareil photo est prêt. J’enlève sans bruit le capuchon de l’objectif. À pas de loups, j’avance dans l’ombre du sous-bois.
Que s’est-il passé ? Qu’ont-elles vu ? Entendu ? Les deux formes relèvent la tête, rebroussent chemin, disparaissent à couvert. Je me glisse avec lenteur jusqu’au lieu de l’apparition. Évanouies. Immobile, silencieux, tous mes sens sont en alerte.
Observer les animaux… Dans le viseur !
Un jappement survient sur ma droite. Les deux biches sont là, à dix mètres. Bruit de course à travers les branches. Je ne vois rien mais, comme cette nuit, mes oreilles seront mes yeux. Je suis le vacarme qui se déplace à toute allure et shoote à l’aveugle dans le fatras indistinct de branches et de feuilles qui défilent devant mon objectif. Une forme bondissante se découvre soudain dans l’ombre du chemin. En quelques bons grâcieux, elle disparaît de mon viseur. La scène n’a pas duré 10 secondes !
Aurais-je été plus ébahi de voir un zèbre, un buffle ou un rhinocéros ? Je ne crois pas. L’excitation de la traque et l’émerveillement d’avoir retrouvé, l’espace d’un instant, le monde sauvage sont les mêmes.
A lire aussi : Le parc national de forêts à vélo
Centre d’initiation à la nature d’Auberive
Le centre d’initiation à la nature d’Auberive offre de nombreux types d’hébergements, tous proches de la nature. Les onze cabanes construites par des jeunes dans le cadre de chantiers de jeunesse internationaux s’intègrent à merveille dans leur environnement. Des tentes confortables offrent également la possibilité de rassembler des groupes plus importants. Les activités d’éveil à la nature et à la randonnée en forêt permettent de découvrir les richesses de la faune et de la flore uniques que compte la vallée de l’Aube. En septembre, un festival de chanson rassemble le public sous un arbre éclairé à la bougie.
Contact : Jean-Yves Goustiaux
Adresse : Maison de Pays BP9 52160 Auberive
Tel : 03 25 84 71 86
Mel : cin.auberive@ligue52.org
Web : cheminsdetraverse52.org
Commentaires
Quelle magnifique étape ! Ce devait être palpitant cette nuit, perché dans la forêt.
Bises, Martine
Halala Martine ! C’était fou ! J’ai passé deux heures à écouter la forêt, complètement hypnotisé par tous ces sons.
L’enregistrement rend un 100ème seulement de tout ce qu’on entend…
Je me suis même fait une petite sortie nocturne malgré la peur de rencontrer des sangliers pour aller enregistrer les crapauds et leur petite voix haut-perchée. Ça valait le coup !
Bises !
C’est mon rêve en ce moment de dormir dans une cabane perchée, juste pour le plaisir de vivre en pleine nature le temps d’une nuit<3
Oui, pour s’évader, c’est le rêve !
Mais si tu n’as pas de cabane sous la main, pour vivre une nuit en pleine nature, tu peux tout simplement faire du camping sauvage.
Ça marche très bien aussi, les bruits sont justes un peu plus… Proches de la tente 😉
J’adore ton article Mat.
Et puis ton fond sonore… trop bien. J’écoute là, devant mon ordinateur ces bruits reposants, tout en te lisant, et en essayant de ressentir ce que tu as vécu.
Très bel article, vraiment !
Merci beaucoup Seb 🙂
Je suis content que le son t’ait fait voyager. C’est lui qui m’a emporté cette nuit.
Pour la biche, en revanche, j’avais besoin de mes yeux ! A ce propos, j’ai assisté il y a peu au brâme du cerf. En matière de son, c’est une expérience in-croy-able qu’il faut faire au moins une fois dans sa vie. J’en ai encore des frissons !
C’est marrant que tu me dises ça, nous aussi on a entendu notre premier récemment, lors de notre dernière virée aux Etats-Unis, il y a quelques semaines. C’est beau et surtout hyper impressionnant !
Bon ta prochaine mission, c’est donc de nous ramener un petit enregistrement audio alors 🙂
Il arrive !